Manifeste pour la construction des États-Unis d’Afrique (LEGS-Africa et Institut Culturel Panafricain, 2013)

La vision qui propose la construction des États-Unis d’Afrique existe et nous  croyons que c’est la voie de justice et de solidarité pour atteindre le progrès. La lutte pour l’unité africaine a été menée par les visionnaires panafricanistes qui, au moment des indépendances, avaient estimé que l’accession à la souveraineté nationale dans la division ne ferait que fragiliser un continent déjà en lambeaux. Seulement, cette vision tarde à être réalisée. Elle tarde à passer de l’espérance au bonheur vécu qu’elle promet.

En ce début du 21ème siècle, poser des actes majeurs pour la construction des États-Unis d’Afrique doit être considéré comme une mesure d’urgence de la plus haute importance. Les enjeux économiques et géopolitiques mondiaux ne nous permettent plus d’ajourner le changement significatif que le continent africain doit mettre en œuvre pour enfin accéder à l’émancipation et à l’épanouissement de ses populations. L’Afrique dotée d’immenses richesses naturelles, d’une démographie exceptionnelle et de potentiels économiques stratégiques uniques, doit être la locomotive de sa propre histoire et assumer sa présence dans le monde.

Pour réussir cette transformation et voir nos aspirations se réaliser, notre continent doit bâtir les États-Unis d’Afrique, c’est-à-dire unifier nos États sur le plan politique, économique, social, culturel et historique. Nous devons réunir toutes nos forces pour devenir un bloc puissant et solide, capitalisant pour la marche du monde et de l’humanité.

Rassembler nos nations en vue des États-Unis d’Afrique, qu’est-ce que cela implique ?

C’est d’abord un parti-pris : le parti-pris de la solidarité entre tous les Africains quelles que soient leurs appartenances, le parti-pris d’œuvrer de concert à notre émancipation collective, le parti-pris de continuer le combat de nos illustres aînés panafricanistes, le parti-pris de devenir maître de notre destin. Comme dans toute démarche novatrice, ce sont les leaders les plus engagés du continent qui doivent s’unir, pour mobiliser les peuples en vue de la construction des États-Unis d’Afrique. Cette union doit être formalisée et offrir une réponse politique lorsque des difficultés surgissent au sein de l’espace continental. Face aux conflits actifs qui ravagent le continent, nous devons être en mesure de prendre en charge notre propre sécurité. A ce titre, il est urgent de constituer un dispositif sécuritaire opérationnel et cohérent au niveau continental. Pour conserver une souveraineté effective, il est impératif que le continent africain, par un contrat d’union véritable, défende son autonomie d’action lorsqu’il s’agit  de résoudre des opérations politiques majeures.

Construire les États-Unis d’Afrique, c’est aussi œuvrer pour que notre continent devienne un grand bloc économique dont la voix pèse sur la scène internationale et qui sait défendre ses intérêts. Au niveau continental, la voie de l’intégration commerciale, monétaire et financière doit être poursuivie. A condition qu’elle s’inscrive dans l’optique de renforcer notre autonomie collective, elle permettra ainsi à nos ddifférents États, dans une démarche collégiale, de trouver des solutions équitables et optimales face aux défis socioéconomiques que nous rencontrons. Nous savons que nous avons les moyens de notre autosuffisance dans de nombreux domaines. Pour rompre avec les nombreuses formes de dépendances que nous vivons, nous avons besoin de faire preuve en permanence de cette solidarité active sans laquelle nos faiblesses sont exposées et exploitées, sans laquelle notre capacité à protéger nos ressources naturelles et humaines est entamée, sans laquelle notre ambition de construire l’avenir que nous voulons pour les générations futures est dépourvue de sens. C’est en nous soutenant les uns les autres et en mutualisant nos ressources, nos efforts, nos énergies et nos talents respectifs que nous parviendrons à maîtriser notre ouverture vers le reste du monde et à faire de notre continent cette fabuleuse terre d’hospitalité et de bien-être pour laquelle nos prédécesseurs se sont battus.

Construire les États-Unis d’Afrique exige également que nous nous appuyions sur notre unité culturelle, historique et linguistique. Notre vaste continent possède une histoire extraordinaire, pas seulement circonscrite aux périodes les plus douloureuses, celles de l’esclavage et de la colonisation. Notre patrimoine historique et culturel est bien plus riche que cela et doit son existence au commencement de l’Humanité. Les savoirs africains et les pratiques culturelles, sociales sont bien souvent antérieurs aux découvertes du reste du monde, en tout cas celles-ci s’en inspirent. C’est tout simplement parce que cela a été oublié et que la transmission de cette particularité historique a été effacée. Il est essentiel que nous nous approprions de manière critique et généreuse ce passé et vécu communs. Il nous revient donc d’écrire notre histoire dans toutes ses dimensions, dans toutes ses complexités et nuances, de manière rigoureuse, scientifique pour rappeler et signifier au monde que les Africains possèdent un patrimoine riche, diversifié et qui a influencé les grandes étapes de l’Humanité et des civilisations.

Ainsi, c’est par l’éducation que nous réussirons à construire cette unité prodigieuse. Dotons-nous de systèmes éducatifs renouvelés qui tiennent compte de nos préoccupations continentales, de notre culture, de nos articulations sociales, de nos inestimables savoirs endogènes, de notre patrimoine historique et de nos langues locales.

Bâtir les États-Unis d’Afrique, c’est aussi choisir des langues de communication pour s’exprimer dans l’union, des langues qui aient du sens et qui nous rassemblent, plutôt que de laisser cela encore et toujours aux seules langues étrangères des empires dominer nos cultures, nos enseignements, nos fondamentaux. A ce titre, le continent gagnerait à soutenir davantage les travaux de recherche sur le patrimoine linguistique de l’Afrique.

Dans ce même ordre d’idée, il faut absolument encourager, développer, favoriser la formation technique et professionnelle dans nos secteurs économiques de souveraineté, dans les domaines de l’agriculture, de l’artisanat, dans les métiers de la chaîne de transformation des matières premières et aussi dans le domaine des 5nouvelles technologies de l’information et de la communication, pour proposer des programmes d’expansion et d’accès simplifié à partir de tout l’espace continental.

La construction des États-Unis d’Afrique doit également s’appuyer sur les acteurs multiples de notre société qui sont des leviers fondamentaux pour l’union continentale. La jeunesse africaine est prête à investir les domaines en pleine mutation et elle doit être au centre de ces projets continentaux car c’est elle qui assurera les succès de demain. Cette nouvelle donne mondiale, celle de la communication rapide, moyen d’expression dont la jeunesse s’est emparé, est un outil de diffusion dont il faut se saisir pour défendre l’idéal panafricain axé sur la construction des États-Unis d’Afrique. Ainsi la jeunesse africaine sera au cœur de cette nouvelle organisation car elle aura en main la cartographie d’une Afrique moderne et novatrice qu’elle aura elle-même inventée.

Il existe un autre groupe qui doit absolument s’engager dans la reconstruction continentale. Gardiennes de nos valeurs fondamentales, les femmes demeurent des piliers essentiels de la société africaine par leurs qualités créatrices et fédératrices. Grâce à leur esprit d’initiative, à leur sens de l’équité et du sacrifice, elles ont un rôle capital à tenir dans la composition unitaire des États-Unis d’Afrique.

Enfin, nous devons nous appuyer de manière ouverte et cohérente sur toute la diaspora africaine. Considérée comme la sixième région du continent par l’Union Africaine, la diaspora possède des compétences inouïes et détient un réel potentiel économique sur l’échiquier mondial. Ce vivier, produit et acteur de notre histoire, doit apporter sa pierre dans la construction des États-Unis d’Afrique.
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Une fois de plus, c’est en affirmant notre identité profonde, nos racines culturelles si flamboyantes, en assumant ce que nous sommes que nous bâtirons des États-Unis d’Afrique avec méthode. Nous devrons commencer par reconstruire notre cohésion perdue, nous devons renforcer notre connaissance de nous-mêmes, notre confiance en nous-mêmes et revaloriser toute l’estime que nous devons nous porter à nous-mêmes. Nous ne pouvons plus envisager notre avenir dans la division, l’absence de coordination stratégique, dans la rivalité et le déploiement des égoïsmes locaux. Si nous ne nous mobilisons pas pour faire face de manière volontariste aux défis de notre temps, nous risquons d’encourager la perte de nos patrimoines, d’augmenter la misère des populations, de pousser les jeunes sur les chemins de l’exil ou sur les voies de la révolte improductive, de fragiliser notre tissu social et de remettre en question notre volonté d’unité, d’être les complices des complots organisés afin de mieux nous asservir, de nous détruire dans des conflits fratricides construits de toutes pièces. Si nous montrons assez d’audace dans une union indéfectible et juste, nous ne pourrons que progresser sur une échelle élargissant au fur et à mesure toutes ses stratégies.

Il faut que partout sur le continent les hommes, les femmes, les jeunes se tiennent debout pour participer activement à tous les niveaux à cette entreprise collective. Il faut que l’unité et l’intérêt général soient au centre de nos actes à chaque instant et en tous lieux.

A la tête des États-Unis d’Afrique, il faut des hommes patriotes conscients des investissements majeurs à réaliser pour atteindre le progrès, il faut des hommes désintéressés et habités par l’enjeu collectif, par l’unité, par l’élargissement d’un espace qui dépasse toute ambition personnelle. Il faut des élites intègres, des chefs d’États incorruptibles, mus par la vertu et qui portent des valeurs républicaines irréprochables. Le potentiel du continent africain réunifié est absolument gigantesque, du point de vue économique, politique, culturel, social et démographique, du point de vue des idées, des forces rassemblées, du point de vue géographique, exposant ses innombrables kilomètres carrés du Cap au Caire, de Praia à Antanarivo. L’Afrique n’est pas un continent de misère, elle est seulement désunie. Osons croire que nous pouvons nous soulever, dans le bon sens du terme, par nous-mêmes. Nos aînés et prédécesseurs ont déjà œuvré pour l’Unité Africaine, continuons sur leurs traces, mais en allant définitivement plus loin dans l’accomplissement de cette noble vision. Ne nous laissons pas abattre par le découragement, il faut lutter, encore et toujours, pour parvenir au changement. C’est dans les situations difficiles que se construisent les grandes œuvres.

Par cette union des États, nous pouvons adresser un message fort à tous les peuples d’Afrique, et à la jeunesse en particulier. Ensemble, nous pouvons construire un monde africain, un monde résistant, courageux qui refuse d’être laissé pour compte, un monde qui ne soit plus dépendant. Ensemble, nous pouvons faire du continent africain un monde qui se meut de lui-même, un monde qui avance, un monde d’hospitalité, où l’on sait créer, donner, recevoir, partager et écouter, un monde dont l’opinion unitaire compte dans les grandes décisions planétaires, un monde qui fasse jaillir toutes les sources vives de la Renaissance Africaine.

Par la construction des États-Unis d’Afrique, nous pouvons affirmer notre identité culturelle comme le produit de nos diversités, de nos richesses et de notre patrimoine historique.(…)

Que vive la vision panafricaniste! Que vive l’Unité africaine ! Que vivent les Etats-Unis d’Afrique !

LEGS-Africa, l’Institut Culturel Panafricain, s’engagent à porter ce manifeste et à mobiliser l’ensemble des peuples africains pour son adoption par les Etats et l’Union Africaine et sa mise en œuvre.

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Fait à Dakar, le 28 Septembre 2013

Ont signé : Fatimata DIALLO BA, professeur de lettres, Mamadou DRAME, enseignant à l’UCAD, Elimane  Haby KANE, sociologue, Président de LEGS-AFRICA, Ndongo Samba SYLLA, économiste, chercheur, Amadou Elimane KANE, poète écrivain, chercheur en sciences cognitives et fondateur de l’Institut Culturel Panafricain et de recherche de Yene.

Pôle de recherche Sénégal pour la construction des Etats-Unis d’Afrique

Contacts :
LEGS-Africa : tomorrowafrica@gmail.com – 00221776508844
Institut Culturel Panafricain : kaneamadouelimane@yahoo.fr – 00221 773529734
http://www.institutculturelpanafricain.org/

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Un commentaire pour Manifeste pour la construction des États-Unis d’Afrique (LEGS-Africa et Institut Culturel Panafricain, 2013)

  1. OUEDRAOGO Paul Desire dit :

    Bonjour Je suis burkinabé et je suis aspirant au panafricaniste certain que l’Union Africain passera par nous les Africains. Jaimerai faire parti de votre projet LEGS Africa. Merci

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